LQJ-282

Krishna Das Oc anographie biologique, facult des Sciences Février 2020 : je réserve plusieurs vols vers l’Australie et la Polynésie française pour une mission de recherche, sans oublier un colloque à Singapour… Trop heureuse de développer un projet à l’université de Griffith avant de voler vers le CRIOBE à Moorea. Il y aura une place dans mes bagages pour ma fille et son papa ! Juillet 2020 : les vols sont annulés, l’Australie a fermé ses frontières, le monde est confiné au rythme des images dramatiques qui nous parviennent via la presse, quasi en continu. J’essaie de travailler sur mes dossiers, de préférence le matin car les après-midis sont généralement plus animés. Ma fille de 13 ans est confinée depuis le mois de mars et se lève péniblement vers midi. L’Australie, la Polynésie française, Singapour, la Corse, l’Allemagne, autant de destinations de travail transformées en visioconférences, en e-mails, en appels téléphoniques, depuis mon salon. Oui, j’accuse le coup mais ce n’est rien face à la solitude de mon ado : plus d’école, plus d’amies à la maison, plus de soirées pyjama, mouvements de jeunesse en suspens, à l’image de ses sorties et des voyages scolaires. L’année sabbatique de son papa est postposée, on n’ose plus faire de pronostic. Ce confinement en famille nous renvoie à une expérience inédite : vivre à trois quasi 24 heures sur 24 sous le même toit. Il faut gérer l’anxiété inhérente à la gravité de cette pandémie, nous devons nous supporter (dans tous les sens du terme) et, au final nous construisons, un vivre-ensemble au quotidien. Janvier 2022. Il y a des êtres chers qui nous ont quittés. J’organise mes prochains séjours à l’étranger, une place dans mes bagages pour ma fille et son papa. La résilience, seule arme face à l’adversité. Frédéric Bouhon Droit public et administratif, facult de Droit, Science politique et Criminologie La crise sanitaire a rappelé que le droit a besoin d’une certaine souplesse. En quelques jours, au printemps 2020, des règles exceptionnelles ont été adoptées, pour confiner la population et limiter drastiquement les contacts sociaux, mais aussi pour confier des pouvoirs spéciaux aux gouvernements, afin de faciliter la gestion des conséquences socio-économiques des mesures sanitaires. Nous avons alors de fait basculé dans un régime d’exception, avec un déséquilibrage des rapports entre les parlements et les gouvernements, mais aussi entre le niveau fédéral, d’une part, et les régions et communautés, d’autre part. En outre, de nombreuses libertés et droits fondamentaux ont été limités, voire suspendus. Or, la Constitution belge est peu adaptée à la gestion des crises et de l’imprévisible. La rigidité qui la caractérise ne permet en théorie pas toutes les exceptions et dérogations que la réalité exceptionnelle a poussé à mettre en œuvre. À défaut de prévoir un régime d’exception, le cadre constitutionnel a été partiellement brisé pour circonvenir aux besoins avérés ou prétendus. À mon avis, la leçon principale à retenir, au point de vue de ma discipline, c’est de mieux prévoir dans la Constitution la possibilité de l’imprévisible. Il y aurait lieu de déterminer les conditions dans lesquelles des mesures exceptionnelles peuvent être prises par les autorités pour gérer les crises à venir (qu’elles soient économiques, sanitaires, climatiques, etc.) et ainsi délimiter et encadrer l’exercice des pouvoirs extraordinaires qui sont confiés aux gouvernements dans ces hypothèses. J.-L Wertz 34 mai-août 2022 / 282 ULiège www.ul iege.be/LQJ univers cité

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