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et la fréquence des feux. À ce rythme, les arbres n’ont pas le temps d’arriver à maturité et d’assurer leur reproduction, et on observe une perte de couvert forestier, continue le professeur. Ces températures plus douces sont également propices à la reproduction des insectes, comme la dendrochtone du pin qui a causé la mort de milliards de pins sur la côte ouest du Canada ces dernières années. » DES PRESSIONS EN PAGAILLE De plus, le réchauffement climatique entraîne avec lui des effets parfois contre-intuitifs. « Comme les températures montent, les forêts progressent vers le nord, révèle Jean-François Bastin. Or, en hiver, ces régions sont habituellement recouvertes de neige et réfléchissent le rayonnement solaire, abaissant localement la température. C’est l’effet albédo. Mais les conifères qui y poussent désormais sont très foncés et retiennent mal la neige. Ils absorbent la lumière, réchauffent le sol et accélèrent ainsi la fonte du permafrost, une source de gaz à effet de serre. » Plus au sud, les forêts boréales laissent place aux forêts tempérées dont nous, Européens, sommes coutumiers. En Europe comme en Asie, et après une large déforestation du Néolithique au Moyen Âge due à l’expansion humaine, les forêts ont maintenant tendance à regagner du terrain. Tendance qui s’est accrue ces dernières années grâce aux programmes de reforestation. Une bonne nouvelle, certes, mais qui ne suffit pas à masquer un tableau plutôt sombre. « En rentrant de République démocratique du Congo, il y a quelques années, j’ai compris à quel point nos forêts ici étaient malades », se souvient Jean-François Bastin. En effet, les forêts européennes, intensément gérées, sont souvent monospécifiques, c’est-à-dire n’ayant qu’une espèce d’arbre, comme l’épicéa, et avec peu de variabilité génétique. « Or, on assiste à une augmentation des périodes sèches, à la fois en durée et en intensité, ce qui entraîne une fragilité et une surmortalité des arbres, en particulier des conifères, analyse le jeune chercheur. Et une seule sécheresse, comme en 2018, va avoir des conséquences pendant les 20 prochaines années ! Sans oublier, comme au nord, les épidémies d’insectes xylophages. » Une analyse partagée par Christian Messier, qui est également préoccupé par la pression conjuguée du développement humain et des maladies et espèces invasives. Selon lui, la mondialisation, et avec elle l’explosion des échanges commerciaux, a largement favorisé l’apparition de ravageurs loin de leurs écosystèmes d’origine. Envato elements En 2022, les canicules et les faibles précipitations ont provoqué des feux de forêt très importants en Europe 14 septembre-décembre 2022 / 283 ULiège www.ul iege.be/LQJ à la une

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