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forêt plus résistante à la sécheresse, en ne plantant qu’une seule espèce adéquate. Il suffit d’une épidémie ciblée pour que cette protection tombe. La redondance est une caractéristique fondamentale des écosystèmes naturels. » Enfin, les chercheurs estiment qu’il est nécessaire de réintroduire une certaine hétérogénéité de population. « Dans toute forêt naturelle, il y a des arbres vieux et d’autres plus jeunes, ce qui assure un renouvellement naturel des générations. Même monospécifiques, nos forêts sont encore des forêts, avec leur microclimat, leur humidité et leur pénombre. Il est donc beaucoup plus facile d’agir aujourd’hui en y introduisant de la diversité, plutôt que d’attendre que l’écosystème soit en train de basculer. Recréer artificiellement ces conditions serait bien trop coûteux », estime Jean-François Bastin, qui incite les organismes forestiers à réaliser dès maintenant ces changements. Pour Christian Messier, les forêts actuelles sont victimes d’une logique comptable, où l’être humain a longtemps cherché à en maximiser les rendements. Mais, selon lui, leur survie dépend de notre capacité à renoncer, au moins en partie, à ce contrôle. Et si cette opinion n’est pas encore très populaire, il constate une évolution. « Il y a cinq ou dix ans, je rencontrais beaucoup de résistance face à mes travaux. Mais les récents événements, comme la sécheresse de 2018 ou les immenses feux en Amérique du Nord ont modifié la donne », estime-t-il. Un espoir partagé par Jean-François Bastin, même s’ i l nourrit aussi quelques doutes : « Trop de décideurs veulent “la” solution unique, tout de suite. Or, les forêts existent sur une échelle de temps différente de la nôtre. Il faut être prêt à accepter d’effectuer des changements maintenant, pour n’en récolter les fruits que dans 50 ou 100 ans ». Un programme d’avenir. Jean-François Bastin est l’heureux bénéficiaire d’un “StartUp Grant Francqui”, un subside accordé bisannuellement à un jeune chercheur pendant trois ans par la fondation Francqui. Pour aller plus loin Des che rcheur s de UL i ège G emb l o u x Ag r o - B i o Te c h ont cont r i bué à une étude internat ionale menée par le comité de pilotage du réseau de parcelles d’inventaire forestier i nternat i ona l – “The Gl oba l Forest Biodiversity Initiative” – dans laquelle le consortium de scientifiques a estimé le nombre total d’espèces arborées dans le monde. https://www.gembloux.uliege.be (GFB) J.-F. Bastin septembre-décembre 2022 / 283 ULiège www.ul iege.be/LQJ 17 à la une

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