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Le superlatif lui va bien : Georges Simenon est le plus connu des écrivains liégeois et, avec Hergé, le plus lu des auteurs belges. Le 13 février prochain, il aurait eu 120 ans. Une belle occasion de le mettre à l’honneur dans sa ville natale. À l’initiative de l’ULiège et de John Simenon, son fils, et en collaboration avec la Ville, un festival baptisé “ Le Printemps Simenon” aura lieu du 8 au 11 mars 2023. article patricia janssens Bientôt le cœur de la Cité ardente battra au rythme de son romancier le plus célèbre. Exposition au Grand Curtius, grande conférence du journaliste et écrivain français Olivier Barrot, colloque scientifique à l’Université et rétrospective cinématographique aux Grignoux, entre autres, témoigneront de l’attachement de Liège à son enfant prodige. Et vice-versa. « Le festival sera l’occasion d’associer dans un même mouvement des enseignants et chercheurs de la faculté de Philosophie et Lettres ainsi que les étudiants, se réjouit Benoît Denis, professeur de littérature du XXe siècle et directeur du festival. Mais la date anniversaire est aussi une opportunité pour revisiter son œuvre et pour s’interroger sur ce qu’il représente dans la culture contemporaine. » PAS DE LITTÉRATURE MON PETIT SIM ! Malgré les apparences, l’auteur de La chambre bleue, du Chat, des Frères Rico est toujours bien vivant en librairie : ses titres se vendent dans le monde entier et sont régulièrement adaptés à l’écran. Le succès immédiat des Maigret a propulsé Simenon en haut de l’affiche dès les années 1930, mais il n’oblitère pas ses 120 romans dits “durs” ou “psychologiques”. « Son activité littéraire la plus aboutie se situe dans les années 1930-1950, précise Laurent Demoulin, conservateur du fonds Simenon à l’ULiège. Ses livres ont le charme du Paris d’antan et distillent un petit parfum de nostalgie. Mais je pense que l’atout majeur de ses romans réside dans leur implicite. Simenon campe un décor, un univers, une atmosphère, avec souplesse et efficacité. Il décrit son héros par petites touches, sans en cerner véritablement les contours. Cette technique laisse le champ libre à l’imaginaire du lecteur, ce qui permet aux histoires de se jouer du temps qui passe. » Alors, immortel Simenon ? « Il est sans conteste inspirant, reprend Benoît Denis. Il reste à l’heure actuelle encore une référence dans le milieu des Lettres. Lors du festival, nous recevrons notamment des Italiens, Hispanophones ou AngloSaxons, auteurs de romans policiers, qui évoqueront leur filiation avec l’inventeur du commissaire Maigret. » C’est qu’il manie l’art du conte avec élégance. Son credo ? Pour commettre un crime, il faut une fêlure. « Il cherche la faille et Maigret trouve l’assassin, poursuit Laurent Demoulin. Celui-ci est bien souvent un quidam, un bourgeois dans une petite ville de province, qui, à la faveur d’un concours de circonstances, décide de changer de vie. » L’écrivain entretient une véritable empathie avec ses personnages, oublie ses préjugés de classe et met en scène toute la société de son temps : les bourgeois, les petits commerçants, les clochards, les industriels, les notables, les aristocrates. janvier-avril 2023 i 284 i www.ul iege.be/LQJ 35 univers cité

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