LQJ-284

Zapatisme, ZAD, “Gilets jaunes”, contestation pour le climat, écoféminisme, circuit-court, coopératives et économie sociale et solidaire : dans la périphérie d’une culture capitaliste qui étouffe et l’espèce humaine et son environnement, un éventail bariolé d’initiatives contestent et questionnent une marche du monde toute puissante et mortifère. Ces laboratoires de nouvelles démocraties, de nouvelles économies, de nouveaux rapports au vivant mettent en défaut l’idée simpliste que la capacité d’aliénation du capitalisme s’opère mécaniquement et automatiquement sur des citoyens passifs. C’est bien de cette base qu’il faut partir pour aborder une critique dépoussiérée du capitalisme et en dégager les alternatives les plus prometteuses. L’enjeu est de renégocier les fondements de la théorie critique classique. C’est en tout cas le pari de Bruno Frère, sociologue à l’ULiège, directeur de recherche au FNRS, et de Jean-Louis Laville, ancien chercheur au CNRS, aujourd’hui professeur au Conservatoire national des arts et métiers de Paris, dans l’ouvrage La Fabrique de l’émancipation. Repenser la critique du capitalisme à partir des expériences démocratiques, écologiques et solidaires1. THÉORIE CRITIQUE ? Qu’est-ce que la “théorie critique” ? Il s’agit d’une branche de la philosophie sociale qui s’étend jusqu’à la sociologie et qui dévoile et questionne les structures de pouvoir et de domination. « L’aliénation pointée par Marx, la réification de Lukács, le consumérisme et la critique de l’industrie culturelle soulevés par Adorno et Horkheimer (les premiers à pointer la manière dont le capitalisme a pu faire main basse sur nos loisirs et sur tous les champs de la vie sociale, ne nous laissant d’autres choix que la consommation) restent d’une brûlante actualité, Repenser De Marx à Bourdieu, la théorie critique dévoile les rapports de pouvoir qui assujettissent des pans entiers de l’espèce humaine et de son écosystème. Mais elle échoue à débusquer les nombreuses initiatives citoyennes qui relèvent de l’émancipé et influencent la société. Ce ne sont ni des utopies, ni des mouvements récupérés par le capitalisme. Dans leur dernier opus, La Fabrique de l’émancipation, paru aux éditions du Seuil, Bruno Frère et JeanLouis Laville osent une nouvelle théorie critique qui en tient compte. ENTRETIEN PHILIPPE LECRENIER Bruno Frère et Jean-Louis Laville E. Marchadour Sociologie janvier-avril 2023 i 284 i www.ul iege.be/LQJ 46 omni sciences

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