LQJ-284

La crise sanitaire de 2020-2021 a confirmé l’ampleur des violences conjugales. Cette réalité, bien connue des services sociaux, a trouvé un écho appuyé dans les médias et s’est imposée à la table des autorités politiques. Durant ce moment singulier, le Collectif contre les violences familiales et l’exclusion (CVFE) de Liège a reçu des appels par milliers comme en témoigne le coordinateur de la ligne d’écoute, Jean-Louis Simoens. À l’ULiège, la Pr Fabienne Glowacz de la faculté de Psychologie, Logopédie et Sciences de l’éducation, a lancé une enquête en ligne au début de la crise Covid1, questionnant les violences entre partenaires pendant le confinement et les liens avec la santé mentale. Regards croisés sur un processus qui dépasse le simple contexte. ENTRETIEN PATRICIA JANSSENS photos Jean-Louis wertz Le Quinzième Jour : Comment expliquer l’accroissement des violences intrafamiliales durant la crise ? Fabienne Glowacz : Le confinement, l’enfermement dans le “chez soi”, a entraîné des tensions dans des couples et peut avoir renforcé les violences préexistantes entre partenaires. Il a surtout accéléré l’escalade de la violence. La proximité quotidienne accrue des couples, la promiscuité parfois et la limitation d’accès aux autres espaces sociaux et publics (professionnels, récréatifs, sportifs, etc.), qui contribuent habituellement à la régulation des tensions et au bien-être des personnes, l’expliquent pour une grande part. De nombreuses études ont montré par ailleurs que les mesures restrictives mises en place par les gouvernements du monde entier – des mesures sans précédent dans l’histoire de la santé publique – ont généré une détresse psychologique importante. Or l’augmentation de l’anxiété et de la dépression est associée au contexte d’intolérance et d’incertitude², incertitude qui, rappelez-vous, était majeure en début de pandémie. Ce sont des facteurs de risque de violence physique et psychologique, ce que notre étude a confirmé pour la période de crise. La crise sanitaire a eu un effet de révélateur de l’existence de violences au sein des familles, connues depuis longtemps mais rendues particulièrement visibles par le discours politique et médiatique. Pourtant, le fait n’est pas neuf : les violences conjugales (et intra-familiales) sont dénoncées par les féministes depuis les années 1970 dans une perspective d’inégalité de genre au sein de la société patriarcale qu’est la nôtre. Depuis lors, plusieurs collectifs et associations se sont 1 Glowacz F., Dziewa A. & Schmits E. (22 February 2022), “Intimate Partner Violece and Mental Health during Lockdown of the COVID-19 Pandemic”. International Journal of Environnemental Research and Public Health, 19 (5),2535. * https://hdl.handle.net/2268/288543 2 Glowacz F. & Schmits E. (23020), “Psychological distress during the COVID-19 lockdown: The Young adults most at risk”. Pyschiatry research, 293, 113486 janvier-avril 2023 i 284 i www.ul iege.be/LQJ 61 le dialogue

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