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les effets secondaires des traitements, mais beaucoup d’impacts au niveau psychologique et au niveau de la réinsertion professionnelle, sociale, familiale. Il ne s’agit donc pas seulement de donner le meilleur traitement au niveau technique mais de donner le meilleur encadrement possible pour que la vie après soit la plus normale possible. » Et si un soutien psychologique est systématiquement proposé aux patientes, le sport peut avoir des effets tout aussi bénéfiques sur la qualité de vie. « Tout patient n’a pas envie d’aller chez le psychologue, même s’il est évident qu’il y a une détresse psychologique, poursuit Guy Jérusalem. Nous avions d’autres outils comme le yoga ou l’autohypnose, cependant les collaborations avec le Pr Maquet et le Pr Kaux nous ont mis sur la piste du sport. Sur l’ensemble des patients, entre le psy ou le sport, 80 % choisissent le sport. » Idéalement, les patients sont informés dès le diagnostic de l’existence de ce programme, ce qui leur permet de se projeter positivement et activement dans leur traitement. Ils doivent ensuite être informés de la potentielle difficulté des premières étapes de la réadaptation fonctionnelle, afin de ne pas se décourager. « L’état de déconditionnement des patients après la maladie est parfois assez important, précise Didier Maquet. Non seulement il y a l’épreuve du diagnostic mais aussi les traitements, la chirurgie, les effets secondaires. Les personnes, sportives ou non, sont souvent très diminuées dans la vie de tous les jours. Aujourd’hui, la période post-cancer est d’ailleurs considérée comme une affection chronique. » Le programme de réadaptation fonctionnelle correspond aux recommandations internationales concernant les affections chroniques, soit une activité de 150 minutes par semaine (voire 75 minutes si l’activité est plus soutenue), combinant activité aérobie (entraînement cardiorespiratoire), activité d’entraînement des grands groupes musculaires (avec faible charge ou poids du corps) et activité d’étirement et de gainage. « Ces recommandations valent aussi dans le cadre du vieillissement en bonne santé », indique Didier Maquet. Collectives, les activités permettent d’entretenir la motivation et le lien social, tout en préservant les bénéfices d’un suivi personnalisé. « Chaque patient qui souhaite suivre le programme passe deux visites médicales, l’une portant sur l’appareil locomoteur et l’autre sur la physiologie de l’effort. On s’assure ainsi qu’il n’y pas de contre-indications à la réhabilitation et on évalue l’état fonctionnel d’entrée du patient, ce qui va permettre aux kinés de fixer des charges d’entraînement spécifiques sur les différents dispositifs. Cette individualisation est importante car on se retrouve souvent avec des groupes hétéroclites, où des patients de 60-70 ans côtoient des patients de 40 ans. » UN CONTINUUM Au-delà des effets spécifiques du sport sur la qualité de vie du patient oncologique, la réhabilitation fonctionnelle témoigne d’un tournant dans la prise en charge du cancer. « Avant, on traitait plus le cancer qu’un individu. Autant la prise en charge pouvait être parfaite, autant il pouvait y avoir des lacunes au niveau du soutien du patient et de sa famille », analyse Guy Jérusalem, devenu oncologue suite à la disparition de son frère, décédé d’un cancer à l’âge de 21 ans. « J’ai été sensibilisé à ces aspects d’empathie que j’ai essayé d’imprégner dans mon service d’oncologie. Il faut aussi avoir conscience que ce n’est pas parce qu’un cancer n’est pas curable qu’on ne peut pas le soigner : les années de vie gagnées sont d’une richesse extrême quand le patient est bien accompagné. » Le sport, par ses effets sur la confiance en soi et ses aspects de convivialité, participe pleinement de cette vision des soins. « Au CHU de Liège, on considère que les traitements ne sont qu’une partie de la prise en charge : l’activité physique, l’éducation du patient et la réhabilitation doivent faire partie intégrante du trajet de soins, au même titre que la chimiothérapie ou la radiothérapie », commente Didier Maquet. C’est dans cette perspective de médecine mai-août 2022 / 282 ULiège www.ul iege.be/LQJ 49 univers cité

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