LQJ-283

DÉCLIN ET RETOUR EN GRÂCE En 1896, Ernest Hankin, bactériologiste anglais, remarque une propriété bactéricide stupéfiante d’un agent dans les eaux de la Jumna et du Gange, en Inde. Après avoir été filtrées, elles présentent une activité lytique contre la bactérie Vibrio cholerae. Mais la thèse du virus, ou du “microbe invisible”, n’émerge qu’à partir de 1915 lorsque l’Anglais Frederick Twort et le Franco-Canadien Félix d’Hérelle étudient le phénomène avec plus de rigueur. Félix d’Hérelle parvient même à isoler et à caractériser les agents lytiques de certaines bactéries et les baptise “ bactériophages”. Au début du XXe siècle, notamment depuis l’Institut Pasteur ou du centre Eliava fondé en Géorgie par Georgi Eliava, un disciple de d’Hérelle, la phagothérapie semble promise à un grand avenir. Mais en 1928, Alexander Fleming isole une toxine d’un champignon aux effets antibiotiques : la pénicilline. En 1940, à l’aube de la Seconde Guerre mondiale, des médecins, des chimistes et des pharmacologues parviennent à reproduire industriellement assez de pénicilline pour tuer les bactéries infectant les organismes vivants. La découverte est miraculeuse. Des dizaines de milliers de soldats blessés, jusqu’alors exposés à des infections incurables et létales, sont sauvés. Il n’en fallait pas plus pour occulter le reste des avancées de recherche en termes d’activités antimicrobiennes. La médecine occidentale plonge alors dans les antibiotiques. Pourtant, Fleming lui-même observe très tôt un phénomène inquiétant : les bactéries mutent et s’adaptent rapidement à leur environnement. Elles développent face aux antibiotiques des résistances de plus en plus importantes. Le recours systématique à ces traitements est d’autant plus limité dans le temps qu’il est déployé massivement. Dès la fin des années 1990, des chercheurs posent à nouveau leur regard sur ces virus, bien plus petits que leurs cibles, mais ardemment volontaires pour grossir les rangs de l’arsenal thérapeutique contre les infections bactériennes. LES PHAGES CHERCHENT LEUR ENTRÉE Le principal frein au déploiement de la phagothérapie est législatif. Des discussions sont en cours pour intégrer les phages dans la pharmacopée européenne. En attendant, leur usage est interdit, sauf pour la médecine humaine, en dernier recours. « Ce qui représente beaucoup de démarches administratives, concède Damien Thiry. Mais Larves du papillon Galleria mellonella Bactériologie vétérinaire - ULiège 48 septembre-décembre 2022 / 283 ULiège www.ul iege.be/LQJ omni sciences

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